• L'avilissement par système.

     

     

    L'avilissement par système.

     

     

     

    L'on donne à choisir entre la mort et la honte et l'on punit incessam­ment ceux qui ne meurent, tel est le fond du procédé, ce procédé-là ne varie et sa vigueur ne se dément, on y revient et l'on y reviendra toujours, les belles résolutions n'y changent presque rien. Pour tenir l'homme dans une crainte salutaire, il faut le remettre à ce choix et veiller à ce que la mort ajoute à ses alarmes, un peuple ne l'appréhendant serait ingouvernable, une terreur qui ne s'avoue est de ressource et quoi que l'on prétende, un peuple obéissant est avili par de certains endroits. En ce qu'on nommera l'esprit civique il est plus de timidité que l'on ne pense et souvent pas mal de bassesse, plus on demande au citoyen et mieux on l'expose au ressentiment par où ses haines se soulagent et ses frayeurs res­pirent. La différence entre les citoyens et les sujets, les sujets et les serfs, les serfs et les esclaves repose sur un emploi grandissant de la terreur, c'est un problème purement quantitatif, cela rappelle l'eau qu'on laisse entrer dans une vanne. Aussi les rages de l'esclave répondent-elles à son avilissement et l'on ne devrait pas s'en indigner, chaque homme voulant retrouver son équilibre et les plus abîmés ne pouvant qu'ils n'abusent de ce qu'ils attrapent. L'ordre est un accommodement d'horreurs permises, de barbarie autorisée et d'équivoques plus ou moins savantes, à cela nul remède et le chaos est pire, nous y perdons beaucoup de nos fiertés, mais le chaos ne nous les rendra guère et l'ordre souffre qu'on lui mente, par là nous avons quelques libertés de reste.

     

     

     

    Albert Caraco / Huit essais sur le mal.


     

    « Ces lois donnent des bénéfices à ceux qui sont déjà riches. L'esprit de chasteté »

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